A partir du moment où les hommes commencèrent à
circuler sur mer, ils cherchèrent le moyen de pouvoir se rendre compte,
la nuit, en face de quelle côte ils se trouvaient ; et c'est le feu seul
qui jusqu'à ce jour a été employé pour indiquer leur route aux marins. À
notre époque où les progrès scientifiques ont mis à notre disposition
diverses découvertes admirables comme celles de la télégraphie et de la
téléphonie sans fil, par exemple, il n'est pas de doute que nous
réaliserons des procédés plus perfectionnés pour aider les navires dans
leur marche ; mais pour le moment ce sont les phares qui donnent aux
bateaux la sécurité nécessaire.
Les
premiers phares.
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Les premiers peuples navigateurs
firent tout simplement usage de feux de bois que l'on allumait
sur un promontoire : le système était bien primitif et que de
catastrophes il provoqua! Il était si facile à des malfaiteurs
d'allumer un feu à un point dangereux de façon à diriger
le bateau sur un endroit où il s’abimait contre des rochers à la
grande joie des pirates qui venaient ensuite piller le navire.
L'une des merveilles du monde :
Le phare d'Alexandrie.
C'est au IXè siècle avant Jésus-Christ
qu'apparut le premier phare, c'est-à-dire la première
construction portant un feu ; c'était une tour située au cap
Sigée à l'entrée de l'Hellespont dans la mer Égée. Plus tard on
construisit des phares aux abords du Pirée et dans les
principales rades de Grèce. Au IIIè siècle avant Jésus-Christ
fut édifiée une tour en marbre blanc, haute de 135 mètres dans
une île de l'Égypte ancienne nommée Pharos, et sur laquelle on
allumait un feu ; c'est du nom de cette île que vient celui de
phare. Cette tour ébranlée fréquemment par des tremblements de
terre finit par s'écrouler en 1302. Quant aux Romains, ils
avaient des phares, à Ostie, Ravenne, Pouzzoles et en Gaule, à
Boulogne ; cette dernière tour était encore debout à la fin du
XVIè siècle.
Les temps modernes.
Jusqu'en 1790 l'éclairage des phares resta
assez rudimentaire ; on se servait de feux de charbon, de feux
de bois, de torches de résines, ou de lampes tout à fait
grossières. C'est à partir de cette époque que cet éclairage
commença à se perfectionner ; ce sont les grands savants Argand,
Fresnel qui illustrent l'histoire des phares, le premier créant
un modèle de lampes, le second inventant les types de lentilles
en usage dans ces appareils ; plus près de nous, en 1889,
Bourdelles apporte aux phares des perfectionnements mécaniques
importants.
L'huile végétale employée pour l'éclairage
fait place à partir de 1890 au pétrole, et de nos jours on
utilise dans certains cas différents autres systèmes comme
incandescence par le gaz, ou par la vapeur de pétrole, éclairage
électrique, acétylène, etc. Suivant leur intensité et par ordre
de décroissance on dit que les phares appartiennent au premier
ordre, au second ordre et ainsi de suite jusqu'au sixième ordre
; les phares les plus puissants sont destinés à renseigner le
navigateur en pleine mer, les phares moyens aident les marins
dans la navigation côtière, les phares les moins puissants sont
utilisés pour les navires qui arrivent dans les ports pour
prendre exactement l'entrée de ces derniers et se diriger dans
les' rades. En général on se sert, dans les phares du premier au
quatrième ordre, de feux marchant à l'incandescence par le
pétrole ; dans les phares des cinquième et sixième ordres qui
sont tout à fait secondaires on emploie des lampes à pétrole au
moyen de mèches et on se sert également de becs de gaz à
incandescence, et de l'acétylène. L'éclairage par lampes à arc
électrique, qui est la source la plus puissante, est
malheureusement coûteux et il demande des gardiens instruits ;
il ne peut donc être employé que dans des points très importants
d’une part et où l'on est sûr d'autre part de trouver toujours
le personnel voulu.
Dans bien des cas les phares comportent à
titre de secours, en cas d'avarie survenue au mode d'éclairage
principal, un dispositif d’éclairage à huile minérale à mèches
multiples.
Nous devons indiquer qu’il existe des
phares qui ne sont pas gardés ; on les visite tous les huit,
tous les quinze, tous les trente jours même.
Enfin nous signalerons même un phare qui
n'a pas de foyer lumineux, c'est celui des Hébrides, sur
l'Armish Rock ; ce phare est constitué par un miroir qui reçoit
la lumière du phare de l'île de Lewis dont il est séparé par un
canal large de 150 mètres.
Les phares se sont multipliés et ce
développement même eût pu devenir un danger pour le navigateur
s'il n'y avait pas toute une réglementation qui permette de les
distinguer les uns des autres. On a adopté un langage spécial
dont la traduction, pour ainsi dire, est contenue dans un livre
publié par le ministère de la marine et qui contient les
renseignements nécessaires sur tous les phares du monde. Ce
langage consiste en différences apportées dans les feux des
divers appareils. C'est ainsi qu'il y a des phares dont le feu
est fixe et blanc, d’autres dont le feu est fixe et rouge ; dans
d'autres appareils le feu est blanc mais à intervalles
parfaitement fixes, il donne un éclat, cet éclat pouvant être
blanc ou rouge. D'autres phares seront scintillants, d'autres
clignotants, d'autres à éclipses. Enfin il y a des feux éclairs
qui donnent des éclipses et des éclats à des intervalles
déterminés. |
Le langage des
phares. |
En outre les phares ne se succèdent
naturellement pas dans le même ordre partout ; ici ce sera un
phare éclair qui sera suivi, sur la côte, par un phare fixe,
lui-même suivi d'un phare scintillant, ailleurs ce sera mi feu
éclair voisin d'un feu à éclats, lui-même voisin d'un feu blanc
à éclats rouges, etc. Cette variété de position des phares les
uns par rapport aux autres achève de rendre parfaitement clair le
langage des phares et les navigateurs ne s'y trompent pas. Il
faut cependant pour éviter toute erreur que le fonctionnement du
phare ne laisse rien à désirer ; il est évident, en effet, que
si un phare s'éteint, ou s'il ne marche pas normalement, si par
exemple il donne un feu fixe blanc au lieu d'un feu rouge bref,
s'il y a le moindre changement dans ses indications le marin
sera désorienté et il arrivera même que cela l'égarera
complètement et amènera une catastrophe. On. comprend donc
l'importance que l'on attache aux modes d'éclairage qui doivent
être d'une sécurité absolue et l'obligation où l'on est de faire
garder les phares par des hommes qui les entretiennent.
Nuits tragiques.
La garde d'un phare demande dans certains
cas la présence d'hommes qu'il faut choisir avec le plus grand
soin ; ces hommes seront mis en effet, à la plus cruelle des
épreuves, celle de l'isolement et dans des conditions souvent
fort pénibles et fort impressionnantes ; certains phares ont dû
être construits très en avant dans la mer sur quelque rocher
isolé, où celle-ci est démontée, pendant toute la durée de
l'hiver; dans ces conditions il ne faut pas songer à maintenir
la communication entre la terre et les gardiens et c'est
quelquefois pendant plusieurs semaines que les hommes vivent
séparés du continent avec des provisions de bouche et de l'eau
en réserve.
Ils sont en général deux ou trois et se
relaient pour la surveillance du phare ; ils sont là
complètement isolés du reste du monde, loin de tout, de
distraction, de médecins, de famille. C'est dans l'un d'eux
qu'eut lieu, il y a peu de temps, cette tragédie racontée par
tous les journaux : ce phare était gardé par deux hommes dont
l'un tomba malade ; dans l'impossibilité de communiquer avec la
terre, cet homme resta sans soins et finit par mourir ; l'autre
resta alors près de son camarade mort et continua courageusement
à assurer sans relâche le service du phare ; ce n'est qu'au bout
de quelques jours que l'on put le délivrer et emporter son
camarade à terre. Quant à la construction qui porte le phare,
elle varie beaucoup ; sur une côte élevée son installation ne
présente aucune difficulté : un simple soubassement suffit ;
sur les côtes basses ou les îles recouvertes par les hautes mers
il n'en est plus de même et il est alors nécessaire de
construire de véritables tours ; c'est ainsi que le phare en
maçonnerie de l’Ile Vierge dans le Finistère a une hauteur de 75
mètres. La construction est en général circulaire pour offrir
moins de prise au vent et aux lames ; on emploie aussi la forme
octogonale qui est la plus économique, la plus commode pour
l'aménagement intérieur du logis et offre encore une résistance
suffisante. Le fer n'est pas très employé parce qu'il c st
coûteux et est très sensible aux intempéries.
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La
portée des phares.
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Il nous reste un dernier mot à dire sur les
phares. Dans les appareils à longue portée on distingue la
portée géographique et la portée lumineuse ; on sait, en effet,
que la terre est ronde et que d'autre part les rayons lumineux
issus d'une source lumineuse se dirigent en ligne droite ; si
donc on considère un phare H. puis que l'on mène du haut de ce
phare une tangente à la mer qui rencontre cette dernière en M on
voit que toute la surface de la mer située au-delà de M ne
recevra aucun des rayons de ce phare qui passeront tous
au-dessus d'elle et qu'au contraire la portion. de la mer
comprise avant M se trouvera éclairée ; la portée géographique
est la distance qui sépare le phare du point M et l'on voit que
suivant l'intensité du phare on aura intérêt, ou non, à
augmenter cette portée en haussant l'appareil suivant que cette
intensité lui permettra d'éclairer plus ou moins loin, et tout
en restant d'ailleurs dans certaines limites pour ne pas
atteindre une zone de brume.
Nous ferons d'ailleurs remarquer que si la
surface de la mer au-delà de M ne reçoit pas de rayons du phare,
un navire placé à cet endroit peut au contraire en recevoir en
raison de son élévation au-dessus de la mer, et ceci augmente
dans des proportions importantes la portée du phare.
Mais les phares ne sont pas les seuls
appareils de signaux employés pour protéger les marins contre
les périls de la mer.
Dans cette lutte incessante de l'homme
contre la nature redoutable et hostile, différents engins de
combat ont été mis en action. Nous aurons prochainement
l'occasion d’en reparler, notamment au sujet des balises, des
bouées, etc. et, en général, de tous les « amers » qui signalent
au navigateur la présence des écueils ou des passages dangereux.
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